Sur France Culture pour débattre de la « cordée européenne » d’Emmanuel Macron
Face à l’activisme européen de Macron, un blocage nommé Berlin ? Yves Bertoncini, Président du Mouvement Européen – France, était l’invité de Cultures Mondes sur France Culture le 20 avril. Aux côtés de Guillaume Duval, chroniqueur d’Alternatives économiques et de Marc Sémo, journaliste au Monde, il analyse le discours du Président français au Parlement européen et la réaction des responsables politiques européens. Retrouvez l’intervention de 18:15 à 56:15.
Le Président du Mouvement Européen rappelle en premier lieu que si la situation géopolitique « appelle à d’avantage d’unité européenne », de grands pays « comme les Etats-Unis, la Russie ou encore le Royaume-Uni ont intérêt à nous diviser ». Une difficulté couplée au « rapport de force » initié par les forces politiques partisanes européenne face à la dynamique portée par Emmanuel Macron.
« C’est en fonction d’un paquet global que l’on construit un compromis » au niveau européen
Pour Yves Bertoncini, « le Président français a le mérite de déployer une vision d’architecte de la construction européenne ». Néanmoins « sa proposition de réformer la zone euro constitue la face nord » de la relance du projet européen. Il rappelle qu’il existe « des sujets beaucoup plus consensuels, comme la sécurité collective des Européens », notamment en ce qui concerne la coopération policière et judiciaire.
Pour qu’Emmanuel Macron mette en oeuvre son agenda européen ambitieux, le Président du Mouvement appelle à « globaliser les sujets », en ouvrant le débat et les positions françaises sur la défense, la solidarité dans l’accueil des réfugiés, la politique agricole commune ou encore la politique environnementale. « C’est en fonction d’un paquet global que l’on construit un compromis » au niveau européen, rappelle-t-il.
"On peut avancer sur les sujets de sécurité collective, la défense mais également le renseignement et la justice. La solidarité dans le domaine des migrations est également un levier, la France n'étant que 16e parmi les pays d'accueil de l'UE" @ybertoncini sur @CulturesMonde_
— Mouvement Européen – France (@MouvEuropeen_Fr) 20 avril 2018
« La politique européenne n’est pas jupitérienne »
« La politique européenne n’est pas jupitérienne. C’est une constellation avec 28 planètes. » Pour Yves Bertoncini, si Emmanuel Macron a bien « fait l’effort de rencontrer tous ses homologues européens, il faut noter que le système politique « vertical » à la française ne fonctionne pas au niveau européen, « où le gagnant ne prend jamais tout. Même aux élections européennes en 2019, il faudra prendre en compte 27 élections nationales. »
« On peut donner crédit à Emmanuel Macron d’afficher sa vision, d’essayer d’emmener les autres pays européens. Mais lorsqu’il dit ‘après tout qui m’aime me suive’, je ne suis pas sûr que ce soit bien réfléchi. On est en Europe dans une cordée. Est-ce que cette attitude signifie ‘je coupe la corde pour les autres’ ? » s’interroge Yves Bertoncini, pointant le besoin d’unité entre les Européens.
Européennes 2019 : Emmanuel Macron souhaite « mettre le système politique européen en turbulences »
Pour Yves Bertoncini, Emmanuel Macron souhaite pratiquer au niveau européen « le chamboule-tout » qu’il a pratiqué au niveau national. « Si le groupe des libéraux constitue sa zone d’atterrissage, il peut essayer de rallier une partie des conservateurs et des socio-démocrates pour constituer un groupe central au Parlement européen en 2019. »
Un groupe renforcé qui permettra au Président français « d’avoir d’avantage d’influence qu’aujourd’hui », même s’il devra « l’inscrire dans une grande coalition – c’est la règle au Parlement européen compte tenu du scrutin proportionnel – et se retrouver dans une forme de concurrence avec Angela Merkel et la droite européenne » note Yves Bertoncini, rappelant la défaire infligée à Emmanuel Macron sur les listes transnationales par le Parti populaire européen.
« Ce qui sert Emmanuel Macron c’est le contexte géopolitique. On se trouve dans un troisième moment fondateur après le Traité de Rome (1957) et de Maastricht (1992) – avec des promesses qui restent à respecter sur la sécurité et la justice. Mais s’il ne veut pas être Robinson Crusoë seul son île, il va falloir être un peu plus subtil. Il devra faire comprendre à ses partenaires de cordée qu’il n’a aucune intention de couper la corde » conclut Yves Bertoncini.